jeudi 26 janvier 2017

Armées d’Hier 02 - Rome et l’Armée Royale (des origines à 509)

Les origines de Rome se perdent dans les mythes et les légendes : le rescapé troyen Enée, les jumeaux Remus et Romulus qui fondent l’Urbs en 753 avant Jésus-Christ, le meurtre de Remus, la lutte contre les Sabins pour trouver des femmes, la disparition dans les airs de Romulus, la liste canonique des 7 rois de Rome (établie par Quintus Fabius Pictor (-254, -201), un des premiers historiens de Rome). Sans revenir sur ce qui appartient au domaine du mythe et ce qui appartient au domaine de l'histoire, nous allons tâcher d'éclairer les armées de l'époque royale, à partir de découvertes archéologiques et surtout des récits du Grec Denys d’Halicarnasse (-60, 8) des livres 2 à 4 des Antiquités Romaines, et du Romain Tite-Live (-59, 17) dans son premier livre de l’Histoire de Rome depuis sa fondation.

I. Une cité-état en botte italique

Les premières traces d’habitation de cette zone marécageuse au carrefour de l’Etrurie et du Latium, au bord du Tibre, datent de -1000. Des communautés villageoises finissent par se réunir autour du Mont Palatin fortifié (une des sept collines de Rome). Nous n’avons pas retrouvé de sources écrites de ces premiers temps, nous ne pouvons donc nous appuyer que sur les récits canoniques de l’histoire de Rome, et admettre qu’elle est bel et bien gouvernée par des rois. Les combats mettent généralement en prise un nombre restreint de combattants, et aboutissent à la constitution d’un butin, au pillage, et assez souvent à la déportation de la population vaincue à Rome, permettant d’étendre la cité-état sur les autres collines, d’augmenter sa population et d’affaiblir les cités alentour. Notons aussi que la cité de Rome mute considérablement au fil du temps, avec la création de temples, l’extension de structures défensives, un pont sur le Tibre sous le règne d’Ancus Marcius, etc. 

Un plan "intemporel" de Rome, présentant les principaux monuments de la ville, datant de la Rome royale ou républicaine, le découpage en régions établi par Auguste (Princeps entre -27 et 14), les différentes collines, les aqueducs en bleu, la muraille du roi Servius Tullius en pointillé noir, celle de l'Empereur Aurélien (270-275) en noir.

Les premières luttes de la Rome royale se font avec ses voisins directs. Les peuples sabins d’abord en 753, avec des prises de villages, des déportations de population, des batailles rangées, et une réconciliation mythique grâce à l’entremise des Sabines, aboutissant à une double royauté et au peuplement du Capitole. C’est ensuite les cités étrusques de Fidènes et de Véies qui sont vaincues en bataille rangée sous le règne de Romulus (753-716). Mais ces deux cités se montreront souvent prêtes à rejouer la guerre. Sous le règne du troisième roi de Rome, Tullus Hostilius (671-640), c’est une guerre contre la cité-état d’Albe-la-Longue qui se met en place et est censée se résoudre par le fameux combat entre les Horaces (une famille romaine) et les Curiaces, (une famille d’Albe-la-Longue). Malgré la victoire du dernier Horace survivant, la cité s’allie à Fidènes et Véies pour rejouer la guerre, mais, battus, la cité est rasée et ses habitants déportés à Rome sur le mont Célius. 

Les Sabines, Jacques-Louis David (1748-1825), 1799

Le quatrième roi Ancus Marcius (640-616) affronte surtout les peuples latins, qui se montrent plus entreprenants : Politorium (qui finissent sur l’Aventin) (Tite-Live 1.33.2) et Médullia. Le port d’Osties plus loin sur le Tibre est fondé. Tarquin l’Ancien (616-578) combat d’abord les Latins d’Apioles, puis la guerre contre les Sabins mobilise à nouveau l’armée, qui est augmentée (Tite-Live 1.36.7-8). Jusqu’à la fin de son règne, il établit une muraille en pierre et combat de nombreuses cités latines avec beaucoup de succès. Servius Tullius (575-535) est à l’origine d’autres combats contre les peuples étrusques, et notamment Véies. Il réforme l’armée (Tite-Live 1.43). Tarquin le Superbe (535-509), dernier roi, combat les Latins, les Volsques, avant de se faire détrôner par Brutus, qui établit la République.

II. Une armée mythique ?

Ainsi, après cette rapide synthèse d’histoire militaire, on se rend compte que les Romains ont combattu les cités alentour, les peuples latins, les peuples étrusques et d’autres peuples locaux. Ils ont pillé, rasé des cités, et ont utilisé la déportation pour peupler la cité-mère, et les ouvrages successifs des rois ont permis d’améliorer la défense, les structures religieuses, aboutissant même à la création d’un port à Osties. Il s’agit maintenant de voir comment l’armée romaine se structure à partir des quelques sources littéraires et archéologiques.

a) L’armée originelle

Romulus a partagé la population entre 3 tribus, menés par 3 tribuns, chacun subdivisée en 30 curies, menées par des curiates. Sans faire un résumé des institutions politiques entre les différentes comices et le Sénat, la legio, c’est-à-dire la levée, et qu’on peut traduire en français par légion, consiste en la levée d’une centurie de 100 hommes et d’une décurie de 10 hommes par curie. On aboutit ainsi à 30 centuries d’infanterie et 30 décuries de cavalerie, soit à 3000 soldats d’infanterie et 300 cavaliers. D’après Denys d’Halicarnasse en 2.14.4, le système d’appel aux troupes est simplifié : le roi demande aux tribuns de réunir l’armée, ceux-ci appellent les centurions qui doivent constituer 100 hommes, et ces derniers appellent les décurions qui doivent emmener 10 hommes. Sans compter les cavaliers. 

Hoplites grecs au combat  (La grande encyclopédie de l'histoire du monde junior tome 1, Éditions Nathan, Paris, France, 1994)

Sans plus de détails, on a découvert la présence de chars dans certaines tombes, aussi il serait possible de parler d’une aristocratie guerrière montée sur char, accompagnée de ses clients : des armées privées en somme, qui s'ajoutent à l'armée de la cité. La milice locale de Rome, la legio, levée en cas de danger, est en tout cas constituée comme la phalange hoplitique grecque, avec un bouclier à deux prises, une lance plus ou moins longue, une structure en files, un casque et une cuirasse en bronze. Mais que dire face aux effectifs militaires assez irréalistes énumérés par Denys d’Halicarnasse en 2.37.5 contre les Sabins, où il parle de pas moins de 20 000 fantassins et de 800 cavaliers ?

Deux soldats romains de la Rome royale.

Notons que Denys d’Halicarnasse indique en 2.13 la présence d’un bataillon d’élite, créé par Romulus lui-même, et composé de 300 cavaliers appelés les Celeres. On peut notamment comparer ce bataillon avec la garde personnelle de 300 hommes des Spartiates, ou bien encore le bataillon sacré de 150 couples homosexuels des Thébains. Quoi qu’il en soit, ces 300 hommes sont adeptes des coups de main et agissent en tant que gardes du corps du roi Romulus. Chaque curie en fournit 10. Ils combattent à cheval ou à pied.

b) Les réformes de Servius Tullius

Au moment où s’engage cette réforme militaire, Rome a fort à faire avec les Sabins, et l’extension de Rome et ses colonies ont sûrement fait évoluer l’appareil militaire. D’après nos sources littéraires, c’est sous Servius Tullius qu’une réorganisation se fait jour. Pour la cavalerie, Servius lève 15 nouvelles centuries de chevaliers (equites) parmi les plus riches, et porte le nombre de cavaliers à 1800 (estimation). A la manière des Grecs, il divise la population romaine non plus seulement entre trois tribus, mais aussi entre cinq classes déterminées par leur richesse. 

Une phalange hoplitique à la grecque.

Les troupes d’infanterie (pedites) tirées des trois premières classes forment l’infanterie lourde, semblable à la phalange, et notamment au niveau de l’équipement : casque (galea), cuirasse (lorica) et jambières (ocrea) en bronze, petit bouclier de bronze (clipeus), lance (hasta) et épée (gladius). La première classe compte quarante centuries d’hommes mûrs, destinés à garder la Ville, et quarante autres d’hommes jeunes, susceptibles d’être envoyés combattre à l’extérieur des murs. Deux centuries supplémentaires d’ouvriers capables de manœuvrer les machines de guerre complètent cette première classe.

Le plus proche de l'équipement décrit par Tite-Live est le troisième soldat en partant de la gauche, qui a l'équipement complet d'un soldat de première classe, et vraisemblablement le bouclier plus long d'un soldat de 2e ou de 3e classe.

D’après Tite-Live, la 2e classe oublie la cuirasse pour un bouclier plus long, et compte 20 centuries. Même chose pour la 3e classe, excepté qu’on oublie aussi les jambières. La 4e et la 5e classe forment l’infanterie légère : les 20 centuries de la 4e classe ne portent pas d’autres armes défensives que leurs vêtements, et sont équipés d'une lance (hasta) et d'un dard (verutum), caractérisant une arme de jet. La dernière classe se compost de 30 centuries : une majorité de frondeurs, ainsi que les joueurs de cors (cornicen) et de trompettes (tubicen). Une dernière centurie compose les citoyens non armés, les plus pauvres. Au niveau du chiffre total des troupes, on parle ou bien d’une légion de 6 000 hommes menée par un préteur, ou bien de deux légions composées chacune de 3 000 soldats d’infanterie lourde. Les unités plus légères sont de l’ordre de 1 200 troupes par légion.

Conclusion

L’armée civique de l’Urbs a eu besoin d’évoluer au fur et à mesure de ses luttes avec les peuples étrusques, latins, sabins, et les cités-états les plus proches. Ce qui n’empêche pas la présence d’armées privées, menées par de riches aristocrates montés sur des chars et composés de clients, comme nous en avons quelques exemples pour la période postérieure. Les réformes de Servius Tullius ressemblent fort à une réforme hoplitique, et les troupes combattent essentiellement en phalange d’infanterie lourde, les troupes légères jouant un rôle plus secondaire. L’armée républicaine fera muter cette forme de combat pour un système manipulaire que nous verrons dans un autre épisode.

Sources :

- DENYS D'HALICARNASSE (Διονύσιος Ἁλικαρνασεως), Ρωμαικής Ἀρχαιολογίας (Antiquités Romaines), livres II à IV
- TITE-LIVE (Titus Liuius), Ab Urbe Condita Libri (Histoire de Rome depuis sa fondation), livre I

Bibliographie :

- ERDKAMP, P., A Companion to the Roman Army, Wiley-Blackwell, Malden, 2007, 600 p.
- LE BOHEC, Y., « Roman Wars and Armies in Livy », in MINEO, B., A Companion to Livy, Wiley-Blackwell, Malden, 2014, p.114-124

lundi 16 janvier 2017

Warhammer Fantasy Battle – Le Monde de la Seconde édition, 1984

Après une première édition en 1983 qui fixe les prémices d'un univers à peine formé, la seconde édition de 1984 est bien moins avare en texte, et présente la première carte d’un univers qui fixe des repères historiques et raciaux et qui constitueront la pierre angulaire de Warhammer Fantasy Battle jusqu'à la 8e édition (2010), que nous avons commencé à traiter à partir de l'Empire. Le premier livre s’intéresse au combat, le second à la magie, et le dernier s’intitule « Battle Bestiary », et c’est de là que sont tirées toutes les informations suivantes. Si cette édition est si intéressante, c'est aussi que certaine de ses nations ont plus tard disparu des livres d'armées, comme les Amazones, l'Arabie, Cathay ou encore les Hobgobelins, et j'en passe. Revenons donc dans le passé, et découvrons l'univers de la seconde édition.


I. Petit tour géographique de l’Eurasie


Au centre, on retrouve le Vieux Monde, bordé au sud par l’Arabie, à l’est par les Montagnes du Bout du Monde, au nord par la Norsca et à l’ouest par l’océan. Le Vieux Monde est peuplé en grande majorité d’humains, les nouveaux venus sur l’échelle de l’évolution après les Elfes et les Nains. On retrouve aussi quelques Gnomes, quelques Nains échappés de leurs montagnes, et les « Halflings » qu’on peut traduire par Hobbit. Les Hommes maîtrisent la technologie de la poudre à canon et de la vapeur, même si le nord reste un peu plus primitif, avec des Barons occupés à oppresser les paysans, rappelant la Bretonnie. Les forêts sont peu à peu défrichées, et l’activité principale reste l’agriculture. Sur le littoral, on retrouve quelques comptoirs commerciaux des Elfes de la Mer. Comptez aussi des groupes d’Elfes des Bois dans certaines forêts, ou d’autres créatures bien plus malfaisantes. 

Des Nains de Norsca, interprétation (source).

Au nord, la Norsca consiste en une vaste zone froide, avec ses montagnes, ses fjords, et ses « Norses », qu’on pourrait traduire par Scandinave. Les Norses et les Nains Norses sont plus endurants et habitués au combat que leurs frères humains et nains. On y vit essentiellement de chasse, et c’est ici que se retrouvent le plus les Ogres et les Trolls. A l’est, les Montagnes du Bout du Monde forment une longue ligne rocheuse, parallèle à la ligne du littoral du Vieux Monde, et se prolongeant jusqu’en Arabie. Les cités naines sont creusées dans et à flanc de montagnes, et sont sujettes aux invasions féroces des Gobelins et autres goblinoïdes. Au plus profond des montagnes se trouvent les Hommes-Lézards. 

Situez-vous.

A l’est de ces Montagnes du Bout du Monde se trouvent les Terres Noires, endroit où les volcans sont légions, la fumée de soufre permanente, et où on retrouve tous les types de Gobelins imaginables. Et plus à l’est encore que les Terres Noires, au bout du continent, se trouve Cathay, monde des Orientaux. Les Hobgobelins se battent très souvent contre les royaumes humains présents, et une île tout à l’est se nomme Nippon, et est la terre des Samurais, dirigés par un Shogun. 

Unité de Cathay.

Au nord des Montagnes du Bout du Monde se trouvent les Montagnes de la Désolation où Harpies, Griffons et autres créatures malfaisantes comme les Chimères y élisent domiciles. Ces montagnes bordent à l’ouest les Steppes du Nord où se côtoient difficilement des groupes nomades humains et hobgobelins. 

Quelques Hobgobelins.

II. Vous prendrez bien un peu d’Afrique et de Nouveau Monde ?

Au sud du Vieux Monde se trouve l’Arabie, qui est exactement ce que le nom représente. Les hommes sont dirigés par des Califes au-dessus desquels se trouve un Sultan. Ils s’occupent essentiellement du commerce. Bien plus au sud que l’Arabie, les Terres du Sud (Southlands) sont vierges, habitées par des humains primitifs. La Nouvelle Côte est l’endroit où se retrouvent les premiers colons Hommes et Nains, essentiellement venant de Norsca à la suite des Invasions Chaotiques. 

Cavaliers du désert d'Arabie (source).

A l’ouest du Vieux Monde et de l’Arabie s’étend un océan dans lequel se retrouvent les Royaumes Elfes, et plus loin le Nouveau-Monde et la Lustrie. L’île des Royaumes Elfes est ronde et compte au milieu des terres de larges chaînes montagneuses. Une partie des elfes se trouve ainsi sur le littoral extérieur de l’ile, ce sont les Elfes des Mers, et une autre partie se retrouve sur le littoral intérieur de l’île, loin de tout, les Hauts-Elfes. 

Unité de Slaans, so old-school (source)

Le Nouveau-Monde est colonisé au nord par les Elfes Noirs, des Elfes corrompus qui ont quitté leur terre ancestrale et qui pratiquent la piraterie, et à l’est par les Elfes de la Mer, au contact des tribus primitives humaines. Quant à la Lustrie, elle se compose majoritairement de jungles luxuriantes où se retrouvent des Amazones, des Pygmées, des Slanns et des explorateurs venant de Norsca.

III. Les pôles chaotiques

Les Désolations du Chaos sont des endroits où la réalité n’a plus court, et où tout devient erratique, altéré. C’est l’endroit où des failles de réalités viennent faire coïncider réalité et démons, et où la corruption des âmes et des corps est sans limite. C’est de là que proviennent les Incursions du Chaos ravageant la Norsca. Les Hommes-Bêtes, les Guerriers du Chaos et de nombreuses ignominies proviennent de cet endroit étrange. Comptez aussi les Nains Noirs, ou Nains du Chaos, d’anciens Norses pervertis par les puissances ignobles du Chaos. De même, certains hommes viennent vouer leur existence aux dieux noirs. Ces désolations se retrouvent au nord de la Norsca, et au sud de la Lustrie.

IV. Un peu d’histoire

En –10 000, les Slann arrivent sur la planète et mettent fin grâce à leur technologie au Grand Age de Glace. Ils créent les Elfes en –9000, et les Amazones en –8000 pour les servir. Ils s’éteignent soudainement en -7000, moment où les premières incursions du Chaos surviennent. Livrées à elles-mêmes, les Amazones de Lustrie se battent entre elles. Les Elfes explorent le monde vers –6000 et colonisent le Vieux Monde, rencontrant les Nains. Les premiers Elfes Noirs émigrent vers le Nouveau-Monde. Les Nains et les Elfes s’allient pour combattre la menace gobeline mais finissent par se battre entre eux, jusqu’au moment où les Elfes plient bagage et quittent le Vieux Monde, laissant derrière eux quelques royaumes d’Elfes des Bois. Les Nains épuisés subissent les Guerres Gobelines à partir de -4000, et ne s’en remettront jamais totalement. 


Les premières civilisations humaines s’étendent dans le Vieux Monde, à Cathay et en Arabie vers –3000. Les Nains combattent aux côtés des Hommes contre les Gobelins pour les refouler en grande partie vers les Terres Noires. Les humains se battent ensuite entre eux, et l’histoire s’accélère. En –500, les explorateurs humains et norses sont refoulés par les Elfes des Mers qui reviennent poster des comptoirs sur la côte du Vieux Monde. En –200, une incursion chaotique déferle jusque dans le Vieux Monde avant d’être repoussée : la Norsca est dévastée, et la corruption des Nains Noirs et des cultistes humains est achevée. En –100, la Lustrie commence à être explorée par les gens de Norsca, et la guerre entre les descendants des Slanns et les explorateurs commence.

V. Les races

Parmi les hommes, créatures développées plutôt récemment, on retrouve d’abord les Amazones de Lustrie qui arrivent à se reproduire par parthénogenèse, procédé contrôlé par des Prêtresses. Leurs guerriers Kalim consomment la Koka, gardent les anciens sanctuaires et temples Slanns, ne mangent pas, ne dorment pas, et sont extrêmement violents. Les hommes d’Arabie croient quant à eux en Allah, ont un système féodal et des guerriers fanatiques appelés « Dervishers ». Les Orientaux de Cathay ont des monarchies, croient au Dieu Simca, sorte de Bouddha fataliste, et comptent comme troupes d’exception les Samurai de l’île Nippon. Les Pygmées sont en Lustrie de tout petits hommes tirant à la sarbacane et chassant le crocodile ou le Slann. Les hommes du Vieux Monde sont divisés entre des duchés contrôlés par un Empereur au centre, partageant un dialecte et une culture commune, un Grand Duché au nord et la Bretonnie au sud. Quant aux Norses, ce sont des chasseurs, et ils comptent parmi eux des Bersekers et des hommes Loups-Garous, très utiles pour le combat.

Des guerrières Amazones (source)

Les Nains vivent longtemps, se reproduisent peu, sont fiers, prompts à la colère et parlent toute sorte de langue, dont leur langue mystérieuse. Les Elfes sont quant à eux raffinés, attractifs et arrogants. L’alliance initiale de ces deux peuples dans le Vieux Monde s’est retournée contre eux, et leurs guerres les ont durement affaiblis. Excepté les Elfes des Bois, les Elfes ont quitté le Vieux Monde, et les Nains gagnants ont dû combattre les Gobelins. Les Elfes de la Mer sont depuis revenus pour participer à des échanges commerciaux sur les côtes du Vieux Monde, pendant que les Hauts-Elfes se maintiennent sur leur île natale. 

Les descendants des Elfes de la Mer, qui ont disparu au fur et à mesure des éditions.

Pour les créatures du Chaos, tachés par la corruption ou venant d’un autre monde, ils comptent aussi bien les démons invoqués par magie que les créatures déformées par les puissances noires. Les Elfes Noirs réfugiés dans le Nouveau-Monde, les Nains du Chaos et les Guerriers du Chaos sont des exemples de corruption. Les Hommes-Bêtes sont quant à eux des mélanges malsains entre animaux et hommes. Excepté pour les Elfes corrompus, ils parlent la Langue Obscure, et sont récompensés par leurs dieux avec les fameux dons du chaos : membres supplémentaires, têtes, … Ils viennent des pôles et leurs incursions se font de plus en plus profondes parmi les terres des hommes, d’autant plus qu’ils sont parfois appuyés par des groupes de cultistes. 

D'autres Slanns, très inspirés des Aztèques (source)

Outre les Gobelins et Hobgobelins et autres Orcs qui assaillent les montagnes naines, Cathay et les provinces humaines orientales, outre les Hommes-Lézards toujours réfugiés au fond des caves, et cette fois aussi dans les jungles, et outre les tas de créatures dont nous avons déjà parlé pour la première édition, on trouve les Slann. Ces descendants de l’ancienne race haïssent leur vieille technologie. Ce sont des créatures amphibies aux pieds palmés qui capturent les explorateurs humains pour les lobotomiser et les utiliser comme esclaves de combat.

Conclusion

Le monde de Warhammer fait un pas de géant avec cette édition. Le but affiché est de créer un monde parallèle au nôtre, dans lequel des races différentes coexistent. Il est très intéressant d'étudier l'histoire d'un monde en pleine expansion créative, pour ensuite voir ce qui en subsiste au moment de la 8e édition, juste avant la destruction de l'univers par la création toute récente d'Age of Sigmar. Pour plus de détails, voyez cet article.

dimanche 15 janvier 2017

Compte-Rendu n°3 : Une cure d’histoire salutaire, Préhistoires d’Europe d’A. Lehoërff

La collection Mondes Anciens

Avec la Collection d’Histoire de France aux Editions Belin en 13 tomes traitant tous les aspects de la civilisation, de « La France avant la France » à 2005, Joël Cornette a réussi son pari de convoquer des spécialistes pour parler de tous les sujets, qu’ils soient politiques, économiques, militaires, sociétaux, culturels et que sais-je encore, en convoquant une masse considérable, et en couleur, de documents iconographiques. Combattant les préjugés historiques encore tenaces, et intégrant une part importante dédiée à l’historiographie, cette collection, bien que chère, est un atout indispensable pour qui veut comprendre l’histoire de France, contre les bonimenteurs de tout poil qui hantent les médias d’aujourd’hui, et qui vendent leur propre histoire de France. 
 
Petite vidéo de présentation de J. Cornette de son Histoire de France.

Une nouvelle collection voit donc le jour, et en mars 2016 sort le premier tome des « Mondes Anciens », toujours sous la direction de J. Cornette, l'historien à la bibliographie longue comme le bras. Il s’agit de revenir sur les grandes civilisations anciennes, à « la source de notre monde contemporain ». Situer l’histoire de l’homme sur plusieurs millénaires permet ainsi « une distance et un recul salutaires » face à un présent qui réfléchit peu à ses racines. Deux tomes sont déjà parus : en mars 2016, Préhistoires d’Europe. De Néandertal à Vercingétorix 40 000 – 52 avant notre ère, et en octobre L’Egypte des Pharaons. De Narmer à Dioclétien 3150 av. J.-C. – 284 apr. J-C

L’Europe, terrain de jeux archéologiques

Anne Lehoërff, historienne et archéologue émérite, s’est chargée de rédiger les 604 pages du premier livre, massif, de la collection. Correctement écrit, celui-ci s’attache ainsi à considérer plus particulièrement l’espace européen. Si les remarques préliminaires sur la préhistoire et la protohistoire permettent d’élaborer un cheminement universel, il s’agit ensuite de restreindre les recherches à l’ensemble des sources non écrites européennes, jusqu’à la domination de Rome. Les autres régions du monde, comme l’Egypte, la Mésopotamie, l’Afrique ont une singulière histoire qu’on ne pouvait synthétiser ici. Ce n’est que l’arrivée de sources écrites, sans compter les inscriptions, qui permet de stopper le discours très construit et étayé de par les illustrations nombreuses et intégrées au récit. 
 

De l’homme de Néandertal qui disparait et laisse globalement place à son cousin l’Homo Sapiens sur le continent, jusqu’au celte Vercingétorix, se retrouvant à combattre les Romains de Jules César, les cultures se sont succédées, et c’est une vraie recherche des origines qui se joue ici : en partant des parois rupestres, de l’outillage et des traces squelettiques et archéologiques des hommes d’Europe, le discours s’étend. Des groupes limités en taille de chasseur-cueilleurs jusqu’aux premières traces d’agriculture et de ce qu’on a pu appeler le processus de « néolithisation ». Comme le rappelle si bien le titre, il n’y a pas une seule préhistoire européenne, mais plusieurs. L’évolution n’est pas linéaire, elle ne part pas d’un point A pour arriver à un point B dans une sorte d’évolutionnisme cohérent. Et cette complexité transparaît bien dans l’œuvre de A. Lehoërff.

L’Homo Sapiens avant l’Homo Sapiens

Sans source écrite, difficile d’élaborer un récit complètement cohérent des quelques 39 000 années avant la domination romaine de l’espace celte occidental. Et pourtant, les monuments, les traces d’habitation, d’enceinte, les nécropoles, les rites funéraires, l’art, les objets d’artisanat, les traces d’utilisation des métaux, la création des armes offensives et défensives faites uniquement pour le combat, l’habillement : toutes ces choses montrent que même sans source écrite, l’homme n’a pas été cette brute ignare vivant à demi-nu et frappant sur son compagnon avec un gourdin. Plutôt que de dire comme on peut entendre aujourd’hui que nous sommes plus évolués intellectuellement que nos ancêtres, il est important de se dire que peut-être une des seules choses qui a changé, c’est la technicité. 
 
Nous sommes UNE espèce, UNE race : l'Homo Sapiens.

Ces idées sont particulièrements visible dans le bilan historiographique établi par l’auteur. Evidemment, depuis la naissance de la discipline, qui est arrivé globalement au XIXe siècle, pour pouvoir remonter au-delà des peuplades gauloises pour l’Europe, de multiples récits sont venus commenter une période où les sources continuent de se faire jour aujourd’hui. La discipline changeante a fait la place à un certain nombre de discours reportés ou non dans la culture populaire, et la synthèse d’A. Lehoërff est là encore d’un grand intérêt.

Un cheminement cohérent

Après une présentation nécessaire d’un monde aux noms changeants, au sein d’une discipline récente et à partir de sources non écrites, l’auteur part de la constitution du genre Homo, de son implantation progressive, au gré des espèces, au sein de l’espace européen. La mutation du chasseur-cueilleur, l’espace de la néolithisation et de la transformation en une Europe paysanne restent progressifs. Les espaces sont marqués par une certaine monumentalisation, traduisant des pratiques rituelles, funéraires, témoignage de cultures aujourd’hui disparues, ce qui est l’occasion de revenir sur le cas des dolmens et des menhirs, bien antérieurs aux Gaulois, et surtout seuls vestiges squelettiques d’ensembles funéraires aux matériaux périssables. 
 
Découvert dans la glace avec son équipement et son habillement, voici l'homme d'Ötzi, témoin d'une époque.

Malgré la pénurie de sources, nous sommes capables de voir la présence d’une mobilité de l’homme, à travers les espaces, et même les espaces maritimes, preuve déjà d’une technicité avancée. Les échanges de matériaux et d’idées sont bien présents dans cette Europe originelle. Une partie un peu plus originale concerne l’ensemble lacustre alpin. Très bien conservés, les restes des habitats, et même le fameux Ötzi, donnent corps à la vie des environs vers -3000 : habitat, pratiques alimentaires, vie autour de lacs, avec la présence d’habitations sur pilotis, d’une enceinte terrestre et de barques pour pêcher, etc. La guerre à l’époque préhistorique, déjà élaborée, à l’extension d’une certaine catégorie de population pré-urbaine avec un certain mode de vie et de la structuration des sociétés aboutissent à la question épineuse du monde celte, en plein Âge de Fer, dans un monde qui, malgré une certaine permanence, se transforme peu à peu, jusqu’à la conclusion de l’ouvrage autour du personnage de Vercingétorix.

Conclusion

Apporter de la connaissance, briser les mythes historiques encore tenaces, nous faire découvrir sous un nouveau jour un monde bien humain qu’on pensait perdu, l’ouvrage d’A. Lehorëff est bien une cure d’histoire salutaire, malgré le sujet très préhistorique. Sans compter à la fin du livre la partie « Atelier de l’historien », qui permet de revenir sur cette étude des hommes d'aujourd'hui sur leur lointain passé, leur méthode de travail, et qui peut être une ouverture intéressante pour tous les amateurs du passé.